Dans le prolongement des fêtes de fin d’année, c’est à une belle séance placée sous le signe du vin et du chocolat que les participants de Vertivinus furent conviés en ce début d’année 2012. La séance fait salle comble.
Le mot chocolat est d’origine sud-américaine, parmi les civilisations mayas puis aztèques. Originaire d’Amérique Centrale et du Sud, le cacaoyer est cultivé pour ses fèves de cacao depuis près de trois mille ans.
C’est à partir du XVIème siècle, à partir des traversées de Christophe Colomb et de ses successeurs (dont Hernan Cortes) que le chocolat est importé en Europe. Il est d’abord consommé sous forme liquide : la boisson chocolatée, faite de chocolat auquel on adjoint du lait, du sucre voire des épices ou de la vanille, devient le nec plus ultra des cours aristocratiques d’Europe.
C’est véritablement au XIXème siècle qu’explose l’industrie chocolatière avec la première usine de fabrication de chocolat installée en 1815 par C.J. Van Houten, la création de nouveaux produits (invention du chocolat à croquer par Cadbury en 1821, de la première poudre de cacao par le même Van Houten) et de nouveaux processus (mise au point du conchage en 1879 par Lindt)… et bien d’autres évènements tant ce siècle en est fécond.
Il existe trois variétés principales de cacaoyer :
. Les forastero: 80% de la production, plutôt rustique et cultivé partout (originaire d’Amazonie)
. Les criollo: 5% de la production, originaire du Venezuela, cultivé en Amérique latine, c’est le type le plus fin et le plus aromatique,
. Les trinitario: environ 10% de la production, c’est un croisement des types précédents (donc un peu moins fin que le criollo)
A noter le nacional qui est en fait un forastero produit en Equateur.
Après avoir été récoltées, les cabosses du cacaoyer sont fendues et vidées et de leurs fèves. Celles-ci sont écrasées et subissent trois fermentations en une semaine. Ces fermentations vont permettre d’extraire la pulpe des fèves, de séparer les graines, de transformer la pulpe en alcool, de réduire progressivement le degré d’humidité des fèves. A la fin de ce processus, qui présente des similitudes avec la vinification, Les fèves sont séchées, nettoyées et torréfiées. On les décortique et les broie pour obtenir le grué. Celui-ci sera ensuite broyé de plus en plus finement pour obtenir la pâte de cacao.
Plusieurs autre opérations (conchage, tempérage, moulage) seront effectuées ensuite en chocolaterie.
Comme la dégustation de vin, celle du chocolat fait appel aux sens de la vue, de l’odorat et du goût, auxquels on peut aussi ajouter l’ouïe. Le dégustateur observera ainsi la couleur plus ou moins acajou du chocolat, écoutera son aspect croquant, sentira ses arômes épicés et notera son acidité, son amertume et sa longueur.
Le chocolat est « un empêcheur de boire en rond » Sa puissance peut venir à bout des meilleurs vins. Il faut un certain de sucrosité du vin pour lutter contre le chocolat. A ce titre, les alcools forts constituent les meilleurs faire-valoir du chocolat.
Le chocolat en France est classifié selon par l’Institut national de l’origine et de la qualité selon les catégories suivantes :
. Les « chocolats d’origine » doivent être produits à partir de cacao provenant d’un seul pays,
. Les « chocolats de crus » sont issus de cacao d’une région géographique identifiée voire d’une plantation unique,
. Les « chocolats grands crus » caractérisent les chocolats dont le cacao a un caractère particulier identifiable de façon unique ce qui justifie un prix élevé.
La dégustation de cette séance Vertivinus mettra en valeur les chocolats suivants :
. Cru Manjani 64% (Madagascar),
. Grand cru 70% (Pérou)
. Grand cru 70% (Tanzanie)
. Pur criollo 100% (Pérou)
. Cru 68% (Ghana)
. Cru Guanaja 68% (Amérique Centrale)
Huit vins sont proposés par Romain pour accompagner la dégustation.
AOC Maury domaine Pouderoux 2008 (14€) : nez aux arômes de mûre, bouche grasse et chaude, plutôt sucrée.
è L’accord avec le cru Manjani (nez réglisse et présentant une bouche sucrée et vanillée, crémeuse avec des notes d’amertume) est des plus réussis.
Assemblage cabernet/abouriou muté sur grain fait maison par Romain : le nez est torréfié et alcooleux. La bouche est très chaude, austère avec des arômes de zeste d’orange.
è L’accord avec le grand cru du Pérou (nez assez peu expressif, bouche fumée et fraîche, avec une belle amertume) est là aussi réussi.
La dégustation des deux crus de chocolat suivants, le grand cru de Tanzanie et le pur Criollo avec les mêmes vins donne des résultats différents : Le premier (couleur claire, arôme épicé et bouche crémeuse) est plutôt en harmonie avec les deux vins alors que le second (couleur acajou, bouche craquante et amère) domine les deux vins et en fait ressortir le sucre de chacun.
Les participants vont maintenant goûter différentes création de ganaches chocolat
AOC Muscat Saint-Jean de Minervois Domaine de Barrubbio cuvée Dieuvaille 2008 (13€) : le nez exhale des notes de fruits exotiques et de noisette. La bouche est grasse et crémeuse, sucrée. Peu de longueur.
è La ganache fruits de la passion s’avère crémeuse et salée. Le fruit ressort parfaitement de l’enveloppe chocolat. Tous les dégustateurs s’accordent à dire que l’accord avec le vin est très réussi.
IGT Lambrusco Domaine Cleto Chiarli (7.27 €) : arômes d’agrumes (pamplemousse), la bouche est salée et fraiche.
è Accord intéressant avec une ganache framboise, au nez torréfié et à la bouche à nouveau crémeuse.
Castano Dulce Mourvèdre 2006 (15.25€) : nez cassis assez prononcé, bouche sucrée et alcooleuse.
è L’accord avec la ganache framboise est plus réussi qu’avec le vin précédent.
La fin de la dégustation se poursuit avec deux derniers crus de chocolat, du Ghana et du Guanaja.
Xeres Pedro Ximenes Alvear 1927 (10.75€) : nez caramel et noix, la bouche est sucrée avec des notes de figues seiches.
Porto Niepoort Tawny (10.90€) : nez aux arômes d’épice, cassis et mûre. La bouche est puissante et alcooleuse.
è A ma table, les dégustateurs expriment une nette préférence pour l’accord Pedro Ximenes avec les deux crus de chocolat. Personnellement, je penche plutôt pour le Porto Niepoort, notamment avec le cru du Ghana.
AOC Maury Mas Amiel 1989 cuvée spéciale (35€) : nez réduit, puis aux arômes de noix et de clou de girofle. La bouche est aqueuse, lactée avec des notes bonbon en fin de bouche. Le vin est apparu en phase descendante.
è Son accord avec les crus de chocolat s’en est ressenti (probablement lié aussi au fait que le prix de cette bouteille, un cran au-dessus des autres, avait fait naître des attentes finalement déçues pendant la dégustation)
Les dégustateurs s’accordent en fin de séance pour valoriser l’accord entre le Saint-Jean de Minervois et la ganache fruits de la passion, deux très belles découvertes de cette nouvelle année 2012.
Les participants de Vertivinus adressent un grand merci à M. Stéphane Pasco, chocolatier à Vertou, pour la qualité des ganaches que nous avons goûtées ce soir là. Ce fut un vrai régal !