Compte-rendu de dégustation : Cidres de Cornouaille

C’est avec un immense plaisir que nous avons accueilli Mark Gleonec, ambassadeur, chantre, que dis-je, barde de l’appellation AOC Cidre de Cornouailles. Il y a deux AOC dédiées aux Cidres aujourd’hui : Pays d’Auge (en Calvados) et Cornouaille en Penn-Ar-Bed. Cornouaille est AOC depuis 1996 après 16 ans de tractations.

Il sera question de pommes et de pommiers lors de cette séance. Sous les yeux de l’adhérent docile, a défilé une litanie de pommes et pommiers entrant dans l’Appellation : Kermerrien, Marie Ménard, Prat Yeaod, C’Huéro Briz… Une douzaine de variétés (seulement les principales, on aurait pu y passer la nuit) y sont passées avec leurs caractéristiques, leurs légendes, leur terrain de prédilection et leur étymologie. Mais pourquoi nous raconte-t-il tout cela ? Hé bien parce que la pomme, au-delà du terrain ou de la cidrification, c’est le nerf de la guerre. Parce que les pommes comme tout fruit du verger, certaines années, ça donne, d’autres années ça ne donne pas ! Un petit aspect aléatoire que les vignerons sont heureux de ne pas connaître avec la vigne. Alors même que l’AOC demande une typicité de cidres aromatiques fruités, demi-sec, légèrement amer, tannique et pas trop pétillant, il faut l’obtenir avec des variétés de pommes différentes d’une année sur l’autre… autant vous dire que l’assemblage champenois doit paraître d’une joyeuse rigolade quand on pense aux assemblages à réaliser pour obtenir un cidre de Cornouaille cohérent.

Autant dire que l’année a une importance fondamentale : chaque assemblage sera différent d’une année sur l’autre et les qualités organoleptiques du produit forcément différentes. Autant dire aussi que la mention du millésime serait largement plus utile sur un cidre de Cornouaille que sur un vin de Jurançon. Ce n’est pas le cas actuellement. Gageons que l’INAO saura comprendre en temps utiles la pertinence  d’une telle mention.

Il n’y a guère plus d’une dizaine de cidrerie qui font de l’AOC Cornouailles. La commercialisation est essentiellement locale. La valorisation du produit est encore faible. Rares sont les Cornouaille qui arrivent à 6€… Il faudrait pouvoir vendre un peu partout en France voire exporter pour viser une valorisation plus juste des Cidres de Cornouaille. A ce titre, il y a certainement encore des marges de progression sur l’AOC… Notez qu’il n’existe pas en France de Caviste spécialisé en Cidres. Vu ce que nous avons goûté ce soir, on ne peut s’empêcher de se dire que c’est très dommage. Le cidre de Cornouaille mériterait mieux.

Les cidres proviennent des récoltes 2014. Comme d’habitude, les commentaires “Bien/Très Bien” sont les miens et les points proviennent de la répartition des trois points attribués par chaque participant aux trois cidres qu’ils ont préférés. La sélection est effectuée par le CIDREF que je remercie grandement au passage.

En entrée un cidre hors AOC.

Cidre Fermier, Jean-Michel Tanguy, Cidrerie du Pays des Avens

Nez balsamique, animal, miellé. La bouche est douce, un léger tanin malheureusement dominé par une présence de brettanomyces… Cela étant, les brett sur du cidre, cela a un petit côté madeleine de Proust du tonneau de cidre de mon grand-oncle (ma première cuite)… c’est moins rédhibitoire que dans le vin pour moi. Bien (1 point)

Cidre de Cornouaille, Jean-Michel Tanguy, Cidrerie du Pays des Avens

Un nez sur de la croute de brioche un peu balsamique. La bouche offre une plus belle consistance. La bouche est demi-sèche, pourtant la bulle fuit assez vite en bouche et laisse une sensation légèrement sèchante portée par de légers tanins. Bien ++ (8 points)

Cidre de Cornouaille, Cidrerie Gilles Goalabré, Au Pressoir du Belon

Joli nez floral, un peu tourbé qui s’ouvre sur des aromes de pomme fraiche à l’aération. La texture est assez crémeuse, la bouche est plus sèche, elle offre des amers riches, des tanins assez présents et surtout une longue rétro-olfaction florale, fruités et tourbée assez complexe. Très Bien ++ (16 points)

Goalabré

Cidre de Cornouaille, Manoir de Kinkiz

Nez de café, tourbe, floral, fruité pomme-pêche assez intense. La bouche est un peu brutale : amers, sucrosité plus appuyée. Du tempérament mais une bulle un peu fuyante qui rend la rétro-olfaction un peu plus courte. L’amertume/tanin colle un peu en bouche. Bien ++ (6 points)

Cidre de Cornouaille, Cidrerie Menelig, Ruz

Menelig est la seule cidrerie bio de l’appellation. C’est un cidre filtré et cela change tout au niveau de la couleur : la robe est claire. Le nez est très singulier : il offre un nez de pomme tapée, de cire et de tourbe. “la pomme est ramassée très mure ici” nous dit Mark. En bouche les tanins sont bruts et les amers puissants. Les amers laissent nettement une sensation de peau de pomme mâchonnée. L’ensemble est relativement plus trapu. Il appelle le repas. L’expression est sans doute moins typique mais intéressante. Très Bien (16 points)

Cidre de Cornouaille, Les Vergers de Kermao

C’est un joli nez fruité et pimpant que nous avons là. La bouche est ronde et légère : pas beaucoup de tanin, pas beaucoup d’amers. Tout est dominé par une persistance aromatique très prononcée. La rétro-olfaction offre de longs arômes fruités. Plaisant mais il faut éviter de manger avec. C’est le cidre du goûter. Très Bien (7 points)

Cidre de Cornouaille, Cidrerie de Menez Brug

On retrouve ici un cidre très aromatique : fruits blancs, verveine, agrumes, floral : un nez joliment complexe. Belle matière en bouche : de la densité, une jolie bouche tannique. Un peu plus d’amers n’aurait pas nuit mais c’est un très joli cidre. La rétro-olfaction très aromatique est longue porte bien le cidre en bouche.  On nous suggère une crème de blé noir aux coquilles Saint Jacques pour accompagner cela… Gargl c’est tentant. Très Bien + (13 points)

 

 

Encore trois places pour le groupe Vertivictuailles

Trois places sont encore disponibles pour le groupe Vertivictuailles qui débute le 19 janvier. Ce sont 4 séances (les trois autres sont le 8 mars, le 19 avril et le 10 mai) dédiées aux accords mets et vins. 2 séances se dérouleront dans des restaurants et 2 séances au château de la Frémoire plutôt avec des aliments ou des préparations traiteurs et sans doute avec un peu de théorie sur les gammes d’accords.

Ces 4 séance coûtent 120€ (restaurants, traiteurs et vins compris) auquel il faut rajouter 15€ d’adhésion à Vertivin pour ceux qui ne seraient pas encore adhérents (20€ pour un couple).

Ceux qui sont intéressés peuvent me contacter pour réserver leur place.

Compte-rendu de séance Verdicchio des Marches en Italie

Voici une séance dédiée au cépage Verdicchio des Marches italiennes : sur les appellations Verdicchio dei Castelli di Jesi et Verdicchio di Matelica. La première est une grosse appellation en bordure de côte, la deuxième est une petite appellation de quelques centaines d’hectares à peine dans le piémont des Appenins bref dans la montagne : un terroir sensiblement plus frais.

Le Verdicchio, ce n’est pas un cépage très aromatique. Il semblerait d’après la littérature que le Verdicchio à l’instar de notre Muscadet gagne à vieillir. Il est hélàs assez compliqué de trouver de vieux Verdicchio sur le marché pour vérifier si le cépage est riche en précurseur d’arômes. Au demeurant pour les vins un peu plus anciens que nous avons eu, nous n’avons eu qu’à constater que le cépage offrait une intensité aromatique plus importante… mais il s’agissait aussi de vins aux rendements plus modestes… Le cépage offre en bouche une jolie structure, un caractère un peu chaud (l’alcool est souvent très perceptible), des amers notables et une acidité qui titille la glotte (heureusement sinon la perception alcoolique serait sans doute moins supportable). Cela en fait un cépage intéressant qui a sa place dans l’échiquier des cépages de premier plan.

Verdicchio di Matelica Borgo Paglianetto “Vertis”  DOC 2012

Premier nez reducteur assez peu expressif, la bouche donne une impression légèrement sucrée que peut conforter un léger perlant, une finale vive et acidulée. Un vin bien droit. Bien +(+) 8 points

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Riserva Umani Ronchi “Plenio” DOCG 2012

Nez assez marqué par l’élevage partiel en fût. L’ananas est dominant. La sucrosité est en revanche un peu appuyée en bouche sans doute à cause de la sucrosité apporté par le fût. Légère astringence “bois sec” selon mon voisin de droite. Amertume un peu appuyée… bon au demeurant pour le commun des mortel c’est un vin assez facile à boire. Bien (0 points)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Superiore, Garofoli  “Podium” DOC 2012

Nez assez peu expressif qui offre une attaque très large en bouche (gras, nappant, un peu chaud). Rétro-olfaction sur des notes de pèche-poire. Vif et assez nerveux en fin de bouche. Malgré la chaleur, un vin intéressant. Bien ++/Très Bien (0 points)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Riserva Marotti Campi “Salmariano” DOC 2011

Nez vraiment peu expressif. À peine j’entrevoie un bref arôme de bouillon cube dont on se demande d’ou il sort. Le jus est très rond en attaque, très vif, claquant, bien tendu. De jolis amers marqués. Bien++/Très Bien (3 points)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Riserva Moncaro”Vigna Novali” DOCG 2011

Nez assez expressif, fruité. La bouche offre un équilibre plus mur avec une légère pointe de CO² perceptible en bouche. La bouche est suave. L’acidité encore assez mordante. Amers notables. Bien++ (7 points)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Superiore Umani Ronchi “Vecchie Vigne” DOCG 2012

Nez fruité, fruits blancs. Bouche large et épaisse. Moins vif mais une acidité qui tend toutefois bien le vin en seconde bouche. En bref une impression de vin plus compact, aux rendements plus serrés mais la chaleur en bouche est aussi un peu plus présente. Très Bien (8 points)

Verdicchio di Matelica Riserva  La Monacesca “Mirum” DOCG 2012

Nez expressif, citron, arnica, fruits blancs. Notes miellées. Bouche crémeuse très intense, large, vive, tendue. Pointe d’amande en rétro-olfaction. Superbe équilibre d’ensemble. Très Bien++/ Excellent (20 points – vainqueur mérité du collectif ce soir. Il était aussi vainqueur de la séance Vertivinus dédié aux cépages italiens blancs autochtones)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Riserva Andrea Felici “Cantico della Figura” DOCG 2012

Nez citronné. Bouche aussi verticale que le précédent vin était horizontal. Vif, tranchant tout en longueur. Un peu plus d’ampleur n’aurait pas nuit mais l’expression est intéressante. Bien++/ Très Bien (14 points)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Riserva Villa Bucci DOCG 2010

Le boisé est assez discret au nez mais offre une palette aromatique un peu plus originale (Fruit, tilleul, tisane). Bouche très crémée, très épaisse toute en largeur. Notes d’amande en fin de bouche. Vif en finale. Il faut reconnaître que c’est un vin bien fait et de bonne concentration. Très Bien + (13 points)

Verdicchio dei Castelli di Jesi Classico Riserva Garofoli “Selezione Gioacchino” DOC 2008

Nez expressif, fruité, fruits blancs frais, zeste de citron. Attaque et bouche très dense, un peu chaude. Jolie compacité mais soutenu par un bel équilibre. Très Bien ++ (17 points)

Idées de sorties

Il y a plein d’idées de sorties oenophiles jusqu’à la fin du mois de novembre.

D’abord il y a le salon des vins et de la Gastronomie de la Beaujoire à Nantes du 13 au 16 novembre… Ce n’est pas trop notre tasse de thé, mais on peut y trouver des domaines intéressants comme le domaine Besombe en Roussillon par exemple.

Ensuite, c’est la saison des portes ouvertes des Vignerons du Muscadet en ce moment… Bruno Cormerais et les accords mets-vins de Marie Françoise sur trois week-end, Michel Delhommeau…etc

Mais s’il fallait en retenir 2, il me semble que la porte ouverte du Domaine Pierre Luneau Papin au Landreau le samedi 28 novembre mériterait tout d’abord encore une fois votre attention tant par les vins du domaine que par des invités de belle pointure. Stéphanie Caslot du Domaine de la Chevalerie de Bourgueil sera présente… disons… le meilleur domaine de Bourgueil à mon goût… et puis on notera la présence du domaine Ogereau d’Anjou… là aussi un domaine de premier rang.

La deuxième porte ouverte à retenir c’est celle de Xavier Gouraud (Domaine des Rigoles des Pins) à Mouzillon le dimanche 29 novembre. C’est une porte ouverte importante parce que c’est la dernière : Xavier Gouraud part en retraite. Le domaine n’a pas trouvé de repreneurs, les vignes sont reprises… mais il est fort à craindre que ce soit différent. Xavier Gouraud c’est certainement le vigneron le plus consciencieux, le plus précis de Mouzillon. Le soin porté à ses vignes et l’intelligence vigneronne dont il a fait part est inégalée dans ce secteur du Muscadet. le dernier millésime en vente du Clos de la Barrilère est le 2010. Excellent millésime et pour l’avoir goûté : excellent vin. Un collector à absolument avoir dans sa cavothèque.

Photo Fred Niger Van Herck

Clos de la Barrilère : Photo Fred Niger Van Herck