Compte-rendu : le Pays Basque espagnol

Compte-rendu d’une séance dédiée au Pays Basque espagnol.

De quoi parlons-nous ici ? Nous parlons de 3 petites DOC espagnoles situées sur la bordure : un vignoble qui borde la commune de Getaria (la plus grosses des trois DOC) et deux vignobles éparpillés dans deux des provinces du Pays Basque : Biscaye et Alava. Nous parlons de vins dont l’origine remontrait au moyen-âge qu’on appelle localement des Txakoli. Et comme le basque s’accorde, un Txakoli de Getaria se lit : Getariako Txakolina. Ce sont… des vins issus d’erreurs œnologiques mais comme l’œnologie et la chimie n’avaient pas cour au moyen-âge peut on vraiment parler d’erreur : à la base ce sont des vins issues essentiellement du cépage Hondarrabi Zuri, cépage autochtone, originellement récolté à sous-maturité, (climat océanique oblige) que l’on vinifiait dans de grands foudres, non collé, non filtrés, troubles, récoltés sur lie, ces vins gardaient un perlant vivifiant en bouche. A l’origine cela devait ressembler à du “cidre de vin” en quelle que somme.
Pour accéder à la DOC, les vignerons basques ont du moderniser leurs pratiques et leurs chais… chose assez aisée puisque le phylloxera avait fait table rase des vignes basques pendant environ 100 ans… autant repartir d’une case blanche.
La dégustation a globalement montré des vins beaucoup plus soignés oenologiquement que devait être leurs ancêtres. La dégustation a pu montrer aussi des vins parfois très dilués… issues de DOC espagnoles peu coercitive (rendement maxi 93 hl/ha pour Getariako Txakolina). Le perlant originel cherche à être conservé dans ces vins embouteillées dans des flutes vert-bouteille. Un perlant beaucoup plus intense que notre Muscadet, on dirait presque parfois des pétillants naturels et les bouchons s’élargissent côté vin comme dans des bouteilles d’Asti. Comment font-ils pour garder autant de gaz ? Cuve close ? Injection de CO² ? Mystère… la recherche de la conservation de ce gaz induit aussi des sulfitages un peu appuyés sur certaines cuvées.

Getariako Txakolina, Txomin Etxaniz 2013
Ce vin offre un nez très fruité, citronné ; un très léger perlant, une bouche assez dense, un perlant assez intense qui offre une bulle bien fine, de puissant amers de peau d’orange en finale, vif. Assez salin selon certains de mes voisins. Bien ++/Très Bien (18 points – vainqueur du collectif)

Getariako Txakolina , Rezabal 2013
Nez assez piquant, atone, bouche vive très diluée assez plate, vif. Moyen (0 pt)

Getariako Txakolina, Ameztoi Primus 2013
Nez assez intéressant, herbe médicinale, anis, thym. Perlant intense. Assez long, bien tendu. Bien ++ (3 points)

Bizkaiko Txakolina, Bodega Itsas Mendi 2013
Réducteur au premier abord puis s’ouvre progressivement sur des notes fruitées aguichantes. Assez peu perlant, bouche soignée. Très moderne… pas très structuré mais irréprochable oenologiquement… le genre de vin qu’on trouve assez facilement dans les hôtels des Baléares. Propre et sans aspérités… sorte de Tariquet espagnol… Bien+ (12 points)

Getariako Txakolina, Arginano, K5 2013
Une belle étiquette moderne qui offre un vin finalement assez tradi… nez un peu champignonné. Perlant, assez simple, matière un peu fluide. Bien (0 points)

Bizkaiko Txakolina, Bodega Virgen de Lorea,  Txakoli Aretxaga 2012
Différence de bouteilles : sur le premier vin le nez est prématurément évolué. Sur la seconde le nez est plus en place. Plus atone aussi. Le perlant est parti (ou n’est jamais arrivé). Assez tapissant. Pas inintéressant. Bien +

Bizkaiko Txakolina, Itsas mendi 7 2011
Changement de registre pour un vin au nez intense et fruité, agrumes, un nez très droit. Une bouche dense, mure et tapissante. Finale aromatique. Joli vin. Très Bien + (11 points)

Bizkaiko Txakolina, Itsas Mendi Eklipse 2011
La Bodega Itsas Mendi a indéniablement investi dans un œnologue chevronné. Les vins et les vinifs sont particulièrement propres… un style très nouveau-monde.  Le nez de ce pinot noir pinote… comme de bien entendu ; un léger grillé, une bouche marquée par une extraction assez notable. Des amers d’extractions comme des pinot noirs sud-africains… Bien ++ (5 points)

Rioja Alavesa, Telmo Rodriguez, LZ, 2013
Le nez est presque évolué sur la cerise cuite et le viandox. La bouche est enrobante, mure. Un tanin fin assez propre bien qu’un peu collant.  Très Bien (0 points)

Compte-rendu séance Bergerac

 

 

Séance dédiée au vignoble de Bergerac pour cette séance Vertivingstone en compagnie du vigneron biologique, libéral et volubile Pierre Carles du Château le Chabrier venu exprès pour nous de Razac de Saussignac. Séance très instructive mais qui s’est terminée fort tard… je vous promet que pour les Vertivingstone nous allons tenter d’éviter ces excès à l’avenir. J’ai volontairement orienté la séance autour de la dégustation de vins biologiques (finalement très nombreux à Bergerac)…et j’ai essayé de mettre à l’honneur quelques producteurs récemment installés… Il y a quelques sacrés vins dans cette dégustation… je ne vous cache pas que cette dégustation m’a plus emballé qu’une séance voisine dans le pomerolais. Les blancs secs sont particulièrement séduisants : ils montrent tout le potentiel qu’on peut tirer d’un sémillon et ou d’un Sauvignon bien mûr.

Bergerac Sec, Château la Tour des Gendres, Cuvée des Conti 2013
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Compte-rendu : séance Géorgie

Séance Géorgie à Vertivin. Une sélection de vin un peu au pif… pas facile de trouver des recommandations de vins géorgiens. La Géorgie s’exporte de plus en plus vers d’autres pays que la Russie, c’est indéniable, mais de là à avoir un choix pléthorique de vins géorgiens sur le territoire français, c’est une autre histoire. J’ai donc fait confiance à un caviste de Hambourg : www.geovino.de pour constituer une sélection de vins géorgiens et notamment quelques vins oranges : ces vins de raisins blancs macérés et vinifiés en amphore enterrées que l’on nomme localement des Qvevris. Je ne vous cache pas que nous avons perdus quelques adhérents en cours de route lors de cette séance très singulière.
En résumé, je pense que nombre de vins orange nous ont plutôt séduits… pour en avoir rapporté à table, ce sont des vins qui passent très bien face à n’importe quel plat de poisson. Les tanins disparaissent bien à table et structurent plutôt bien le vin. Même si sans manger, ça a fait un peu bizarre à certains. Quoiqu’il en soit un vin orange ne signifie pas nécessairement vin oxydatif. Les rouges ont, pour nombre d’entre eux, été marqué par des imperfections œnologiques ; certaines assez désagréables.

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Compte-rendu : le futur cru Château-Thébaud en Muscadet Chap. 2

La démarche de cru communal Château Thébaud.
Il faut bien trouver un petit vecteur de communication fût il grégaire à travers ce blog pour expliquer la démarche du cru communal Château Thébaud.
D’abord, en premier lieu, la commune de Château Thébaud, un bout de celle de Monnières et un bout de celle de Vertou sont marqués par une unité géologique singulière que les géologues nomment granodiorite. C’est quoi donc ce machin… et bien c’est un caillou à mi chemin entre le granit et le gneiss. C’est un granit qui commence à peine à se métamorphiser. Il n’existe pas ailleurs ce type de caillou dans le vignoble nantais. En termes de sols, le granodiorite produit des sols plutôt sableux mais assez profonds et plutôt fertiles. Ce qui a conduit les vignerons de Château Thébaud à sélectionner des parcelles dans les coteaux assez précoces… (On vendange sur ces terrains près d’une semaine avant les proches terrains de granits du cru Clisson) donc faiblement argileux proches de la vallée de Maine car ils se sont vite aperçus de la qualité des terrains de ces zones moins profondes.

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(Carte identifiant grossièrement les coteaux surplombant la Maine pour la démarche de cru communal Château Thébaud – INAO à partir de l’IGN)

On voit bien sur la carte ci-dessus, les différentes zones identifiées pour la réalisation d’un cru communal : on distingue une série de coteaux surplombant la Maine. Au centre de cette série de coteaux, un plateau limoneux impropre à la production de vins de garde ; La zone du cru Château Thébaud est délimité au sud par une faille géologique du sillon de Bretagne très visible qui délimite le granit du granodiorite et au Nord la zone est délimitée par la Maine. La délimitation par la Maine conduit à des approximations géologiques puisqu’il existe sur la zone de château Thébaud une poche de Gneiss en face de Saint Fiacre. Etrangement, sur ce sol plus pauvre, les vignerons ont plutôt planté du gros plant pour en réduire la vigueur (alors qu’ailleurs, le gros plant cépage secondaire était planté dans les moins bons terrains). Elle ne devrait pas être concernée par la démarche de cru. Au Nord Ouest, la zone de granodiorite est également traversée par des lentilles de roches vertes (Amphibolite). Ce qui complexifie la lisibilité de la zone destinée aux crus.

Pont-Caffino.jpg

 

Sur la falaise de Pont Caffino, falaise issue d’une ancienne carrière, on distingue nettement des traces vertes d’amphibolite insérés dans le granodiorite. Sur le haut de Pont Caffino, la vigne… il n’y a pas lourd d’épaisseur de terre.

C’est uniquement à partir de 2006 que les vignerons de Château-Thébaud se sont rassemblés en une association pour valoriser leur cru. Pourtant Jérémie et Yves Huchet à la Chauvinière ont depuis 1990 voulu faire ressortir une typicité « granit de Château Thébaud » sur leurs étiquettes. Château Thébaud est aussi une commune un peu singulière dans sa commercialisation de vins… et l’INAO est aussi attentive à cette singularité pour faire ressortir une typicité puisqu’elle n’est pas qu’issue du terroir mais doit être aussi portée par les savoir faire. Or commercialement parlant, Château Thébaud est composée de gros domaines disposant de larges surfaces et favorisant depuis longtemps la commercialisation en vente direct. Historiquement Château Thébaud est aussi reliée au commerce sur la Loire grâce à la chaussée des Moines de Vertou qui depuis le XIe siècle permet à la Maine d’être navigable jusqu’à l’écluse de Pont Caffino.

 

Suite à la présentation de la démarche de ce cru communal à Vertivin, s’en est suivi d’un débat sur la necessité de produire de nouvelles AOC dans un paysage d’AOC françaises déjà complexes. Qu’il y ait une typicité des crus communaux du Muscadet c’est vraisemblable… la dégustation étatn plutôt convainquante sur ce point. Toutefois il est indéniable que nous sommes dans le domaine de la subtilité… et au final guère plus d’une dizaine de dégustateurs, techniciens agricoles ou œnologues mordus de Muscadet en France peuvent sans doute distinguer les différents crus en bouteille. Faut-il, doit-on, faire des AOC communales et multiplier des AOC déjà illisibles… On ne connaît déjà pas Saint Pantaléon Les Vignes, ce fameux cru communal des Côtes du Rhône, à quoi cela sert-il d’en rajouter ? A cela, un vigneron comme Jérémie Huchet répondra : « c’est pour nous, vignerons que nous faisons cela : c’est la reconnaissance de notre travail d’adéquation entre un terroir, un cépage et un usage. » Il me semble en effet qu’il faille distinguer la minutie d’un travail d’adéquation qu’il est necessaire de reconnaître et la lecture que peut en faire le consommateur… Il y a autant d’AOC en Italie qu’en France voire plus. Les Italiens ne les connaîtront pas toutes pas plus que nous. Ce qui est important c’est de reconnaître une réelle hiérarchie des appellations en fonction du travail effectué par les vignerons. Le consommateur ne retiendra jamais 360 AOC mais il retiendra 3 ou 4 catégories d’AOC. A l’Etat d’avoir le courage politique pour distinguer les différentes catégories d’AOC selon la minutie de travail

d’adéquation entre un terroir, un cépage, un rendement, un usage au chai. Et tant pis si ça fait mal à Saint Emillion ou en Champagne. L’information du consommateur est sans doute à ce prix.